vendredi 29 avril 2011

Prémices


Révolution, liberté et démocratie. Trois nouveaux concepts qui cheminent l’un suivant l’autre dans l’esprit du jeune tunisien. Qu’en sait- il ? Rien ! Tout comme tout autre fils ou fille de ce pays-chéri, je ne savais de la révolution qu’une pointe de rébellion contre ses parents, étant adolescent. Je ne savais de la liberté qu’une marge très étroite. De la démocratie ? Je savais que c’était un mythe. J’en ai déjà entendu parler, chez Montesquieu, les révolutionnaires français et moultes autres penseurs. Tous la font rimer avec partage, égalité et liberté.

Ces trois valeurs auraient existé sous un régime politique  où la loi assure la sécurité et la liberté de l’individu. Ce que Montesquieu qualifierait de « la loi positive ». Hélas ! bien que républicain, le régime tunisien n’a jamais su instauré cette loi. Est-ce la faute au régime ? Si on se réfère à Montesquieu, on trouverait une définition intéressante de la République. «  Le gouvernement républicain est celui où le peuple ou seulement une partie du peuple a la souveraine puissance ». Bien évidemment la partie du peuple dont parle Montesquieu serait la majorité souveraine ayant remporté la majorité des votes. Malheureusement ou heureusement, dans notre cas elle  correspond éventuellement à la fameuse bande des Trabelsi.  Instaurant leur propre loi, ils ont fait de notre Tunisie une jungle où le droit de survie est le privilège du plus fort. Pillage, vols et viols ainsi fut leurs lois. Une pseudo république, une liberté factice et une égalité illusoire. 

Mais un jour de 14 Janvier, la belle au bois dormant se réveilla et son sommeil prit fin. Ce jour la le peuple tunisien réclama son droit à la liberté, son droit à l’égalité, son droit à une loi qui lui assure son intégrité. Oui nous avons rompu un silence d’une vingtaine d’années. Oui nous avons crié haut et fort « ZABA dégage » ! Oui nous avons eu notre révolution. Ce jour la nous avons goûté à la liberté. Et maintenant faut la croquer à pleines dents !

A suivre…

jeudi 28 avril 2011

La représentation de la Femme dans la peinture occidentale



                
Depuis les débuts de l'art moderne, la femme est un thème récurent chez l'artiste.
La femme représente les symboles et idéologies qui se distinguent selon l'époque et le lieu.
Elle n’est pas seulement un objet de convoitise des voyeuristes, elle est la liberté, l’érotisme, la rêverie, l’argument symbolique, l’universalité. La différence entre la femme sublimée et l’objet sexuel est faite par le talent du peintre, et du modèle aussi.
 Cependant, toutes ces représentations ont un esprit commun : l'ambivalence chez la femme.
L'homme qui dépeint ces femmes a eu des relations particulières avec elles et chaque peinture illustre une idée morale de ces femmes mettant en jeu deux rapports distincts.
Effectivement, la femme dans la société détient des rôles et des enjeux variés très largement usés dans les sujets picturaux : la femme peut être la mère donnant la vie, la maîtresse amenant à la corruption, l'amante que l'on aime et qui est un idéal de beauté ou la sainte implorant la grâce divine.


             La femme victime du péché



«Yahvé Dieu appela l'homme: «Où es-tu ?», ditil. «J'ai entendu ton pas dans le jardin, répondit l'homme, j'ai eu peur parce que je suis nu, et je me suis caché.»» Selon la Genèse (III, 9-10), la nudité est associée au péché originel, et, pendant sept siècles, de l'Ève couchée de la cathédrale d'Autun, que Gislebertus sculpta rampant dans les feuillages pour y dissimuler son indécence, à l'impudique Olympia de Manet et aux corps fragiles et menacés de Munch, la statuaire et la peinture occidentales oscillèrent entre la célébration du corps issue de la tradition grecque et le regard honteux ou concupiscent hérité de la vision et de l'enseignement bibliques.
Le nu constitua, dès l'Antiquité, un genre en soi pour la sculpture. Dans la peinture, la représentation du corps nu fut d’abord intégrée dans des scènes religieuses avant d'exister comme un thème à part entière.
Les muses, les amantes, les légitimes ont prêté leurs plastiques pour que reviennent les héroïnes de l’ancien et du nouveau testament. Eve, Danaé, Suzanne, les filles de Loth, Salomé et beaucoup d’autres promènent leurs galbes et leurs rondeurs depuis plus de six siècles. Elles sont objet de convoitise, de contemplation. Dans sa figuration, la femme, seul son aspect charnel se détache "carne, carne, sempre carne"
On peut trouver l’écho de cette perspective dans l’œuvre d’Artemisia Gentileschi. Vivant dans la première moitié du XVIIe siècle, elle reprend de son père Orazio la limpide rigueur du dessin en lui rajoutant une forte accentuation dramatique héritée de l'œuvre du Caravage et chargée d'effets théâtraux. Remarquablement douée et aujourd'hui considérée comme l'un des premiers peintres baroques, l'un des plus accomplis de sa génération, elle s'impose par son art à une époque où les femmes peintres ne sont pas facilement acceptées. Elle est également la première femme à peindre l'histoire et la religion à une époque où ces thèmes héroïques sont considérés comme hors de portée d'un esprit féminin.
D’ailleurs on lui doit la plus belle et émouvante représentation de Suzanne au bain, scène biblique mainte fois représentée; la jeune fille prend son bain et se fait surprendre par deux vieillards lubriques.
Sa Suzanne a les jambes qui se serrent ses mains affolées battent le vide pour se protéger de l’agression des deux vieillards qui complotent leur futur méfait, tandis que l’un d’entre eux impose le silence à la jeune fille dont le visage de dix neuf ans reflète la crainte et l’angoisse figée dans l’attente.
Cette œuvre réalisée en 1610, et aujourd'hui conservée dans la collection Schönborn à Pommersfelden,  laisse entrevoir l’influence de Caravage dans son réalisme et contribue par sa composition strictement géométrique à mettre en relief la condition féminine de l’époque. Sur la toile, Suzanne, dévêtue, se tient assise sur une ligne horizontale, alors que les deux vieillards sont debout  selon des lignes verticales. Entre autre, le peintre souligne la position de soumission de la femme victime de la soif des hommes pour la chair.


               La femme et la tentation manipulatrice

A l’image de la déchéance et de la rédemption s’oppose une autre image de la femme. Encore dans le même contexte biblique, la femme n’a pas été seulement un objet sexuel, mais aussi l’incarnation du courage, de  la ruse et de l’intelligence. Cette illustration trouve son écho chez Rubens avec son fameux Dalila et Samson.
« Un souvenir me revient de ces années d’enfance que je
croyais blanches : j’avais sept ans.

Je tenais entre mes mains une bible illustrée pour enfants, grand format. Je contemplais, fasciné, un dessin représentant Samson et Dalila.
Ses longs cheveux dorés avaient été coupés dans son sommeil. Sa force avait roulé avec des mèches blondes sur le carrelage bleu.
Il était debout, titubant de sommeil, tête presque rasée, demi-nu. Dalila le regardait les yeux mi-clos du fond du lit, sa chevelure noire étalée sur l’oreiller blanc. Dans un arrière-plan de tentures rouges, des soldats venaient se saisir de celui qui jusqu’ici les effrayait et qu’une nuit de jouissance venait de vider de sa puissance.
Ce qui me troublait n’était pas dans cette scène mais dans ce qui avait dû la précéder : rien ne pouvait être plus terrible pour Sanson que de perdre la force qui lui avait permis de triompher des ennemis de son peuple.
Si cela était arrivé, c’était parce qu’il avait cédé à l’attraction d’une chose plus persuasive que la peur de la mort. 
A sept ans je ne savais pas nommer cette chose.
Je devinais qu’elle avait un lien avec la nudité d’une femme et je rêvais à des délices aussi grands, lourds de si graves conséquences. Je chassai le souvenir de cette image.
Celui qui s’apprête à jouir ne veut pas penser et quand bien même le voudrait-il, il en est incapable : ses paupières sont calcinées par le soleil qui devant lui s’élève.
Il est en train de devenir aveugle. »
Cet extrait  de ” Louise Amour” de Christian Bobin, plonge  ce tableau de Rubens dans une  vague de romantisme inappropriée. En effet,  Cette toile qui date  de 1609, exposée à la national Gallery de Londres,  est une illustration de l’épisode biblique où Dalila séduit Samson, apprend de lui que sa force réside dans sa chevelure, le rase pendant son sommeil et le livre aux siens.
Dans ce grand Rubens fumeux,  la femme, Dalila notamment, est en position de force. Son regard lumineux et «  chatoyant » se fixe sur sa victime : Samson. Ce dernier, ivre et aveugle au complot, plonge entre ses bras dans un profond sommeil. Ainsi, Rubens laisse entrevoir, dans un mélange de tonalités roses et crème, une image vigoureuse de la femme.
Et comme le dit Bierce « La femme serait plus charmante si l’on pouvait tomber dans ses bras sans tomber dans ses mains ! » Epigramme.

                  La femme écartelée entre la voix de la raison et l’appel à la passion

 « Elle flotte, elle hésite ; en un mot, elle est femme » c’est avec ces mots que racine définit la femme et résume l’éternel combat entre la raison et la passion chez la gente féminine. Et qui dit passion et raison, dit Phèdre. Cette figure mythologique, symbole du désir interdit et de la part de vice qui demeure en tout être humain, fut le sujet d’une fameuse toile d’Alexandre Cabanel. Ce dernier est alors membre de l'Institut, couvert de médailles, doté pour ses portraits d'une clientèle aussi inépuisable que fortunée.
Phèdre appartient aux grandes compositions théâtrales qui jalonnent la production de l'artiste. Le modèle est probablement l'épouse de l'un des frères Pereire, cette riche famille de banquier parisien dont Cabanel fit plusieurs portraits et dont il décora l'hôtel particulier. Que penser donc des intentions de Cabanel quand il met en scène dans le rôle de Phèdre une femme de banquier, aussi frêle que Sarah Bernhardt qui triomphait dans le rôle depuis 1872 à la Comédie française, dans un intérieur dont le luxe antique n'a rien à envier à la débauche décorative de la fin du XIXe siècle ? Certainement rien de commun avec Zola qui, prenant comme à l'ordinaire Cabanel pour cible favorite, écrit : « Voyez cette misère. Voilà Monsieur Cabanel avec une Phèdre. La peinture en est creuse, comme toujours, d'une tonalité morne où les couleurs vives s'attristent elles-mêmes et tournent à la boue. Quand au sujet, que dire de cette Phèdre sans caractère, qui pourrait être aussi bien Cléopâtre que Didon ? C'est un dessus de pendule quelconque, une femme couchée et qui a l'air fort maussade. »
Sur cette toile, la Phèdre de Cabanel, apparait en proie au désespoir, littéralement anéantie, comme en témoigne sa posture amorphe et lymphatique. Celle qui jusque là avait toujours fait preuve de force et de dignité nous semble tout à coup fragile et vulnérable. Son regard figé et ténébreux s’oppose au teint diaphane et aux formes langoureuses et sensuelles de son corps qui semble dénué de vie. D’ailleurs par l’utilisation de la technique du clair-obscur, Cabanel traduit cette idée de la dualité. C’est un véritable combat de la lumière et de l’ombre qui suggère la bataille entre la pureté et la perversion dans l’inconscient de Phèdre.
Aux pieds du lit, et à gauche du tableau, se trouvent deux servantes. La première est assise a même le sol, la tête renversée en arrière et les paupières closes. Ses bras tombent avec nonchalance, signe à la fois d’impuissance et de désespoir. Sa comparse se tient debout, penchée en avant et à moitié sortie du tableau. Elle se tord les mains, comme rangée par l’angoisse. De par son attitude, elle semble à être la seule qui ne soit pas laissée aller à la résignation : il y a quelque chose dans sa posture  qui suggère qu’elle réfléchit, s’efforce de trouver une solution ou peut être des mots pour consoler sa maitresse qui vient d’annoncer son amour incestueux pour Hippolyte le fils de son mari Thésée.

                La femme à la pureté des saints

Atala ou les Amours de deux sauvages dans le désert de Chateaubriand a fourni le sujet de l'œuvre la plus populaire de Girodet. Il suit de près l'épisode du roman: l'Indien Chactas, aidé du père Aubry, ensevelit Atala, jeune chrétienne promise à la religion, qui s'empoisonne pour ne pas succomber à l'amour. « Ses beaux yeux étaient fermés, ses pieds modestes étaient joints, et ses mains d'albâtre pressaient sur son cœur un crucifix d'ébène. » (Anne Louis Girodet-Trioson, 1808).

Sur cette toile, tout est réuni pour retranscrire avec fidélité l’histoire que Chateaubriand a fait paraître en 1801, mais sans que le peintre ne s’embarrasse de cohérence chronologique. Le tableau mêle en effet des allusions à différents moments de cette histoire des « amours de deux sauvages dans le désert » : la veillée funèbre, évoquée par la parole de Job dans la paroi de pierre, le moment où il a fallu creuser la tombe, rappelé par la présence de la bêche, la bénédiction de la mourante, au cours de laquelle on lui a mis dans les mains le crucifix qu’elle tient sur son sein.
Le prêtre, droit dans la douleur, se tient  sur une ligne verticale  ce qui suggère l’élévation et la droiture. la jeune fille suit l’horizontale ce qui maintient la stabilité voire même l’immobilité. Chose tout à fait naturelle puisqu’ elle est morte ! et le jeune chactas, accablé de douleur, serre avec passion les genoux de la défunte.
L’Indien Chactas, Atala et le père Aubry sont tout les trois étrangement descendus dans la fosse et semblent suspendus dans le déroulement funèbre.
Par l’ouverture de l’arcade, on entrevoit le paysage verdoyant d’une forêt. Le tout est couronné par une croix pour souligner le caractère sacré de l’évènement et inscrire la toile dans la tradition des piétas.  .
Ce passage vers l’extérieur et lui-même le point duquel jaillit la lumière et éclaire un coté du mur de la grotte sur lequel le peintre n’a pas manqué de gravé quelques lignes citées par chateaubriand : "J'ai passé comme la fleur, j'ai séché comme l'herbe des champs". Les contrastes jouent avec le clair-obscur et l’ombre qui frappent le dos de l’homme sauvage et le buste de la femme.
Cette lumière matinale dorée,  effleure sensuellement Atala, son visage et sa poitrine légèrement visible sous son linceul blanc mariant ainsi le caractère religieux  à un érotisme morbide. 
Ce jeu de lumière s’associe à un contraste de couleur qui varie entre un blanc pâle, du brun, un vert pacifique, du marron et se heurte à un rouge vif de l’habit de Chactas. Ce choix de couleur n’est en aucun cas hasardeux. Le vert apaise l’œil du spectateur, le marron est une teinture d’obscurité,  le blanc est l’incarnation  de la pureté virginale d’Atala et le rouge souligne l’ardeur des sentiments du jeune indien.
Par ces techniques, Girodet reste fidèle à l’école néoclassique. Mais il n’en reste pas moins vrai que la douleur poignante de Chactas étreignant le corps sans vie de sa bien aimée compose une palette de sentiments appartenant déjà au romantisme.



La femme et l’érotisme

« De triomphe en triomphe, ainsi que le disent les frères de Goncourt, son imagination se déroule en souriant. De ses pinceaux, de ses crayons, qui ne se lassent point, sort la mythologie du XVIIIe siècle [...] La Volupté, c'est tout l'idéal de Boucher; c'est tout ce que sa peinture a d'âme. Ne lui demandez que les nudités de la Fable; mais aussi quelle main preste, quelle imagination fraîche dans l'indécence même, quelle entente de l'arrangement, pour jeter de jolis corps sur des nuages arrondis en cous de cygnes! Quel heureux enchaînement dans ces guirlandes de déesses qu'il dénoue dans un ciel! Quel étalage de chair fleurie, de lignes ondulantes, de formes qu'on dirait modelées par une caresse ! » 
C’est ainsi que les frères Goncourt décrivent les charmes de ce siècle et rendent hommage à boucher, artiste incontestable du 18eme. Elève de Lemoine, François Boucher, commence à pratiquer la scène de genre, dont le goût se répand chez les collectionneurs. Il puise ses sujets dans le monde élégant, dont il représente les activités quotidiennes. Mais, très vite, les scènes se cantonnent à un unique thème décliné dans ses multiples variantes, celui de la femme, seule, accompagnée d'une servante, ou en galante compagnie, ce qui, en quelques sorte, trahit le gout de l’époque. Mais il n’en reste pas moins vrai qu’en matière de femmes, boucher nous présente des chairs grasses d’une extrême finesse. L’odalisque brune en est un admirable exemple.

Cette œuvre qui date de 1745, est une composition rococo. Plus qu'une scène de genre, c'est un tableau licencieux, destiné au regard d'amateurs avertis. Rien ne masque ici d'un prétexte facile l'intention érotique: l'odalisque est couchée à plat ventre, présentant au spectateur les rondeurs de ses fesses dénudées, dans le désordre d'un intérieur qui évoque le luxe et la chaleur d'un boudoir où les êtres peuvent se livrer aux débordements des sens. Et le pinceau de l'artiste se plaît à l'évocation de la sensualité, qui transparaît jusque dans le soyeux et le moelleux des étoffes et les éclats nacrés de la chair rehaussée de rose. La composition de cette toile repose sur le pli. Le pli de la fesse du modèle, le pli du tapis en bas à gauche et les étoffes en désordre. En effet le modèle se serait roulé pour retiré la table sur laquelle sont disposé ses bijoux. Ce mouvement de retournement est traduit par la position de ses bras et le regard, dérangé vers le spectateur. Ce même désordre des plis et ce pivotement s’opposent en effet au trait réguliers de lit et au carré des coussins apportant une coulée d’harmonie et une satisfaction visuel au regard du spectateur.
En tant que spectateur, on a l’impression que la lumière vient de l’extérieur de la toile, plus exactement du coin supérieur gauche. Le trait de  la lumière suit en effet le même sens selon lequel est déposé le personnage de boucher : la diagonale. Elle éclaire une partie du visage, l’épaule dégagée de la chemise et sa jambe droite. Ce qui met en relief le contraste entre le bleu qui domine la toile et le rose de la chair féminine.

 C’est « Un délicieux exotisme de boudoir qui règne dans cette image qui pourrait représenter Madame Boucher. Le spectacle impudique du corps abandonné au désordre des étoffes confère un caractère délibérément licencieux à ce tableau dont il existe à Munich une Odalisque blonde d'esprit voisin. »  Écrit le Louvre.  



La femme, origine du monde

La femme était généralement présentée dans sa nudité mais avec l’avènement du 19eme siècle,  les peintres divergent vers une autre perspective.  La femme n’est plus un objet de plaisir mais aussi une ouvrière qui accomplit sa tache quotidienne, artiste, ou encore mère de famille.
En effet, ce genre de représentation est  pris en considération dans l’œuvre  de Berthe Morisot. Née à Bourges en 1841, Nièce de Fragonard elle devient l'élève de Corot en 1862 et fait la connaissance de Daubigny et de Daumier avant de rencontrer Manet en 1868 qui lui enseigne la technique du pastel. Elle se rapproche des impressionnistes et expose avec le groupe dont elle devient un membre actif. Elle est la seule femme peintre à exposer avec les impressionnistes en 1874. En 1877 elle épouse Eugène frère de Manet dont elle devient la belle-sœur. Ses thèmes préférés sont les marines, les paysages et les scènes familiales. En effet, son ouvre qui illustre son penchant aux scènes familiales, le Berceau, est un des rares tableaux à être apprécié par la critique à cette exposition impressionniste.
Cette toile qui date de 1872 est une  Huile sur toile de 56 x 46 cm, exposée au Musée d'Orsay à  Paris. Elle représente un sujet de la vie moderne : un enfant endormi dans son berceau. L’artiste met en scène Edma, sa sœur, et sa fille, Blanche.  
La composition frappe par sa rigueur. L’artiste utilise la diagonale montante. Structuré par des plans perpendiculaires dans lesquels s'insèrent deux triangles constitués de la jeune mère et du rideau du berceau, l'ensemble converge vers un point abstrait mobile qui circule du visage de l'enfant aux yeux clos à celui de la jeune femme au regard abaissé. En effet, la partie supérieure, voilée, fait écho a la partie inférieur, voilée elle aussi, comme le visage de la mère fait échos a celui de l’enfant. Ils sont situés à proximité des points naturels d’intérêt de la toile.
L'extrême économie des couleurs, tout se joue en noir et blanc, contribue à faire de cette petite toile au réalisme dépouillé un manifeste de la nouvelle esthétique.
Le tableau est éclairée du coté gauche. La présence de voilages induit  des effets de transparences qui ajoutent encore de la douceur de l’œuvre.
Tout confère donc à cette toile une légèreté, une délicatesse et une sérénité qui mettent en valeur le rôle estimable de la femme en tant que mère bienveillante. Et comme le dit Geneviève Daurmann, dans le bateau du courrier : « A quoi mieux peut servir une femme qu’à accueillir au plus chaud d’elle-même un ancien bébé qui a un peu froid ? »